Provoqué par le passage répété des engins lors des opérations viticoles, le tassement des sols risque à la longue, d’affecter les rendements. Quels leviers les vignerons peuvent-ils actionner pour limiter la dégradation de leur capital-sol ? Du choix d’un matériel adapté à l’ajustement deleurs interventions, en passant par le recours à la robotique qui a un rôle à jouer… pour être efficiente, la stratégie doit s’envisager de manière globale.
« La compaction perturbe la vie des sols : elle réduit l’activité de la microfaune et des organismes essentiels au fonctionnement des sols, cause des baisses de minéralisation et de production d’azote », rappelle Christophe Monget, Directeur Technique de la Ceps-Sicavac en charge du domaine expérimental de Sancerre. « Elle est aussi responsable d’une mauvaise infiltration de l’eau, avec des risques de stagnation, de ruissellement et donc d’asphyxie racinaire ».Or, ce phénomène bien connu a tendance à s’amplifier et conduit les vignerons à envisager toutes les solutions pour préserver leurs parcelles.
Des ajustements au quotidien
Cela passe d’abord par les choix opérés chaque jour dans la conduite de l’activité, avec des interventions programmées autant que faire se peut selon l’état des sols et les fenêtres météo. « Pour les passages hivernaux, on attend souvent une gelée, qui permettra de ne pas tasser. On peut aussi être amenés à différer une opération car la portance des parcelles n’est pas bonne et qu’il y a un risque important de créer des ornières en passant avec des engins lourds » indique Christophe Monget, précisant que certaines situations exigent des compromis, quitte à endommager une partie de son capital-sol quand un passage s’impose sur un terrain insuffisamment ressuyé.
En amont, l’itinéraire technique et les pratiques au vignoble ont évidemment leur importance. Par exemple, le travail du sol en profondeur permet certes de détasser les horizons les plus profonds, mais la parcelle sera ensuite beaucoup plus sensible au tassement... La fréquence des passages, première responsable de la compaction, peut de son côté être réduite par l’utilisation d’outils travaillant plusieurs rangs à la fois. De même, l’enherbement de l’inter-rang améliore la structure du sol et limite de fait l’effet de tassement au passage des engins, tout en favorisant la circulation hydrique et celle des nutriments.
Bien choisir ses machines et leur équipement
Au-delà des stratégies culturales, le principal instrument modérant la dégradation des sols reste le matériel. « Le type d’engins – tracteur ou enjambeur, mono ou double-rang – leur poids, les caractéristiques des pneumatiques seront déterminants » souligne Christophe Monget, qui recommande de se référer au modèle Compsoil, développé pour calculer « en fonction de la largeur et du diamètre du pneu, la surface en contact avec le sol et la répartition du poids, donc les effets répercutés par unité de sol ».
Car si, a priori, plus les machines sont légères moins elles tassent, le type de pneumatiques peut complètement changer la donne :« Une machine de 3 tonnes peut faire autant voire plus de dégâts qu’une de 5 tonnes, selon qu’elle engendre une surface de contact des roues au sol plus ou moins importante ».
Les atouts du robot enjambeur Ted
L’utilisation d’un enjambeur autonome, tel que celui de Naïo, permet d’adresser une partie de la problématique. Son faible poids d’abord (1,2 tonne contre 3 à 5 pour des modèles classiques), est un réel atout pour la portance de l’engin. « Avec un robot comme Ted, on va certes augmenter un peu la fréquence des passages mais ce sera compensé par le fait d’avoir une charge beaucoup plus légère, qui évite le tassement en profondeur. Or, c’est sur les horizons profonds que le sol se déstructure le plus vite et de manière irréversible » note Thibaut Delcroix, Responsable Produit Vigne chez Naïo. Ainsi, le rapport poids/puissance couplé aux pneumatiques utilisés n’aura pas du tout le même impact. D’autant que la structure même de l’enjambeur le positionne loin du cep de vigne, à l’inverse d’un tracteur classique dont les roues affleurent le pied. Le travail se fera donc uniquement sur les horizons superficiels, avec un passage de roue à distance d’au moins 50 cm de la zone la plus critique pour le bon développement de la plante.
Par ailleurs, la fonction autonome du robot autorise une meilleure gestion des fenêtres d’intervention, parfois serrées en fonction de l’état des sols. L’exploitant n’aura pas à arbitrer, sur un délai court, entre deux tâches à effectuer. « Dès que le sol est ressuyé, le robot peut partir dans la parcelle sans attendre la disponibilité des ouvriers viticoles, occupés sur d’autres opérations qui n’ont pu être réalisées auparavant« , souligne Thibaut Delcroix.
Une stratégie globale
Quels que soient les moyens utilisés, ils doivent cependant être réfléchis de manière globale, une machine légère pour le désherbage n’ayant que peu d’impact si de lourds engins passent ensuite. « Un schéma global intéressant peut être d’enherber les inter-rangs, de faire passer un enjambeur léger et de travailler uniquement sous le rang, tout en veillant aux pneumatiques choisis. Mais tout ceci est aussi fonction des régions, des terroirs, des habitudes et contraintes de chacun », nuance Thibaut Delcroix.
Un impact que les équipes de Naïo gardent à l’esprit dans les projets qui visent à développer la polyvalence de Ted. « L’idée est de rester sur un porteur léger, avec une charge réduite au maximum pour limiter l’effet de tassement. Les outils, moteurs et équipements à adapter sur Ted dans le futur sont donc réfléchis en fonction de cette priorité ».